Né Labrunie à Paris en 1808, Gérard de Nerval – du nom d’un clos ayant appartenu à sa famille maternelle – perd très tôt sa mère, dont il ne connaîtra jamais le visage. Ce manque originel est déterminant, et c’est dans les jeux enfantins des premières années passées à Mortefontaine, dans le Valois, que se décide la quête de l’éternel féminin. Quelques grandes figures féminines empruntes de nostalgie, inspiratrices des Filles du feu (1854), emplissent déjà les souvenirs du jeune homme.
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De retour à Paris en 1814, Nerval fréquente le même collège que Théophile Gautier, avec lequel il se lie d’amitié. En 1827, il traduit brillamment le Faust de Goethe. Grâce à Gautier, il est introduit dans le cénacle romantique, et rencontre Hugo. En 1830, il participe à la bataille d’Hernani et prend position pour la révolution lors des Trois Glorieuses. Tourné vers la rêverie, il refuse de succéder à son père, médecin militaire, et s’engage résolument dans la voie de la littérature. C’est en 1834, l’année où il abandonne ses études de médecine, qu’il fait la connaissance de l’actrice Jenny Colon, à laquelle il restera toute sa vie très attaché, malgré la séparation, puis la mort en 1842. Jenny marque de son sceau toute l’œuvre à venir. De 1834 à 1840, Nerval voyage à travers l’Europe : Italie, Belgique, Allemagne, Autriche, où il se lie avec la pianiste Marie Pleyel.
En 1841, il est victime d’une première crise de folie. Nerval vit alors dans l’inquiétude et la fièvre, tiraillé entre le désenchantement de toute une génération, relayé par une conscience aiguë de ses propres échecs, et l’aspiration à un idéal. Subissant l’influence des Romantiques allemands – Heine et Hoffmann surtout – il trouve dans le culte du souvenir et l’approche du fantastique une démarche propice à une meilleure compréhension du moi intérieur. Très affecté par la mort de Jenny Colon, il parvient tant bien que mal à maîtriser ses délires épisodiques, et entreprend un long voyage en Orient à partir de 1843. Le récit de son périple, habité par les légendes orientales et le mysticisme, paraît en 1851.
Entre lucidité et hallucinations, il se consacre alors à la composition d’œuvres majeures, comme La Pandora, Sylvie et Les Filles du feu, ou encore Les Chimères. Après plusieurs rechutes, il est interné quelque temps à la clinique du docteur Blanche, où il compose Aurélia, puis se retrouve sans domicile, errant dans Paris. Un matin de l’hiver 1855, il est retrouvé pendu à une grille de la rue de la Vieille-Lanterne, près de la place du Châtelet.